27 avril 2022
Le 17 mars 2022, le Conseil constitutionnel a déclaré conforme à la Constitution l’intégralité des dispositions de la nouvelle loi[1] « visant à améliorer la protection des lanceurs d’alerte », à l’exception de son article 11 qui ne présentait aucun lien avec les autres dispositions. La France est ainsi le 8ème pays de l'Union Européenne à transposer la Directive du 23 octobre 2019 « sur la protection des personnes qui signalent des violations du droit de l'Union »[2].
La nouvelle loi, qui entrera en vigueur le 1er septembre 2022, renforce le dispositif existant en élargissant le domaine des alertes (1.). Elle permet désormais aux lanceurs d'alerte d’émettre directement des signalements externes en supprimant le dispositif par paliers institué par la loi Sapin II (2.). Enfin, elle étend considérablement les mesures de protection des lanceurs d’alerte et des personnes qui les aident (3.).
Le critère de « désintéressement » est remplacé par celui d’absence de contrepartie financière. Cette notion fait référence à la Directive, qui exclut du statut de lanceur d’alerte les personnes qui « ont été identifiées comme informateurs ou enregistrées comme tels (…), et signalent des violations aux services répressifs en échange d’une récompense ou d’une indemnisation. ».
Le lanceur d'alerte pourra désormais bénéficier du régime de protection s'il effectue un signalement externe sans avoir préalablement dénoncé les faits en utilisant le système interne mis en place au sein de son entreprise. L’alerte externe pourra être adressée à l'autorité compétente désignée par Décret, à savoir au Défenseur des droits, à l'autorité judiciaire, à une institution, un organe, ou un organisme de l'Union Européenne compétent.
Elle pourra également intervenir après un signalement externe, si l’alerte n’a pas été traitée dans un délai qui sera fixé par Décret en Conseil d’Etat par les autorités.
On peut également craindre que les modalités de traitement des signalements externes par les autorités soient complexes et longues, rendant leur efficacité pratique limitée.
Elle établit notamment une liste non exhaustive contenant quinze mesures de représailles et augmente le montant de l'amende civile encourue par une personne qui aurait engagé une procédure civile ou pénale dite « bâillon » à l’encontre d’un lanceur d'alerte, pour entraver son signalement.
Mais surtout, ni le lanceur d'alerte ni son complice ne pourront être sanctionnés pénalement pour avoir soustrait, détourné et recelé des documents confidentiels dans le cadre de l'alerte, contenant des informations dont ils auront eu connaissance de façon licite.
Le juge aura la faculté d’accorder une provision, qui pourra être rendue définitive à tout moment, au titre des frais de justice du lanceur d'alerte, ainsi qu’une provision supplémentaire au lanceur d'alerte dont la situation financière se serait gravement dégradée.
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Le Décret en Conseil d’Etat permettra de préciser certaines modalités pratiques, s’agissant notamment de la réception et du traitement des alertes externes, et des mesures que les entreprises devront mettre en œuvre pour adapter leur système d’alerte interne.
Cette nouvelle loi devrait encourager les entreprises à renforcer leur dispositif pour inciter leurs salariés et cocontractants à recourir aux signalements internes
[1] Loi n°2022-401 du 21 mars 2022 visant à améliorer la protection des lanceurs d'alerte.
[2] Directive (UE) 2019/1937 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2019 sur la protection des personnes qui signalent des violations de droit de l’Union.