20 août 2014
Publication | France - Energie & Environnement
Par Véronique Fröding, avocate spécialisée dans le secteur de l'énergie et des énergies renouvelables notamment
En application de la loi n° 2014-1 du 2 janvier 2014 habilitant le Gouvernement à simplifier et sécuriser la vie des entreprises, le Gouvernement a pris l’Ordonnance n° 2014-355 du 20 mars 2014 relative à l’expérimentation d’une autorisation unique en matière d’installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) publiée au Journal Officiel du 21 mars 2014 (ci-après « l’Ordonnance »). Le décret d’application n° 2014-450 du 2 mai 2014 a été publié au Journal Officiel du 4 mai 2014 (ci-après « le Décret »).
L’Ordonnance et le Décret prévoient des dispositions pour deux types d’autorisation :
Les deux procédures sont quasi-identiques, elles se distinguent l’une de l’autre en ce que la procédure applicable aux installations énergétiques comporte des dispositions relatives à la prise en compte du permis de construire et de l’autorisation d’exploiter au titre du Code de l’énergie.
Il s’agit dans les deux cas de mettre en place à titre expérimental pour une durée de trois ans une procédure d’autorisation unique basée sur la procédure d’autorisation ICPE de l’article L.512-1 du Code de l’environnement sur le territoire de certaines régions (dans 7 régions pour les installations énergétiques, dans 2 régions pour les autres installations). Les projets sont autorisés par un arrêté préfectoral unique dénommé « autorisation unique » délivré par le préfet de département.
Il sera décrit ci-après les modalités de mise en œuvre de l’autorisation unique des installations énergétiques.
La procédure d’autorisation unique s’applique aux nouveaux projets d’installations énergétiques soumis à autorisation ICPE situés intégralement sur le territoire des régions de Basse Normandie, Bretagne, Champagne Ardenne, Franche-Comté, Midi-Pyrénées, Nord Pas de Calais et Picardie. Sont exclus du champ de l’expérimentation les projets non intégralement situés sur le territoire de l’une ou plusieurs de ces régions.
L’autorisation unique vaut autorisation ICPE au titre de l’article L. 512-1 du Code de l’environnement mais comprend aussi les éventuelles autres autorisations devant être obtenues par le porteur de projet parallèlement à l’autorisation ICPE. Le porteur de projet peut ainsi obtenir, après une seule demande, à l’issue d’une procédure d’instruction unique et d’une enquête publique, une autorisation unique délivrée par le préfet, couvrant l’ensemble des aspects du projet. L’obtention de l’autorisation unique nécessitera le respect de l’ensemble des prescriptions réglementaires qui s’appliquaient à chacune des autorisations fusionnées :
Le contenu du dossier unique, qui peut être fourni sous forme électronique, est précisé aux articles 4 à 9 du Décret. Il s’inspire du dossier de demande d’autorisation ICPE et comporte comme pièces essentielles :
En application de l’article 8 du Décret, le dossier de demande doit être complété pour les projets éoliens par les différents accords obligatoires au titre de la défense nationale, de la navigation aérienne et des radars. Ces accords spécifiques doivent donc être obtenus en amont et ne sont pas couverts par l’autorisation unique.
Les dispositions éventuellement nécessaires relatives à la prévention des risques sismiques, cycloniques, naturels et miniers sont supprimées, en laissant au préfet le soin de les demander si nécessaire. Ceci implique qu’à défaut de décision préfectorale en sens inverse, les éoliennes et installations de méthanisation peuvent être implantées dans les zones soumises à ces aléas sans mesure de prévention.
Après dépôt auprès des services de la Préfecture, la demande est instruite suivant la procédure précisée aux articles 10 à 21 du Décret.
La phase de recevabilité comprend :
Dans les quatre mois à compter du dépôt de la demande d’autorisation, le demandeur est informé de l’achèvement de l’examen préalable du dossier et de l’avis de l’autorité administrative de l’Etat compétente en matière d’environnement.
En cas de non-obtention des accords susvisés ou de dossier incomplet (nonobstant une demande de compléments et de correctifs), la demande d’autorisation est rejetée. Le rejet doit faire l’objet d’une décision motivée. L’objectif est de pouvoir refuser rapidement un projet qui n’a aucune chance d’aboutir, afin que le porteur de projet puisse s’investir dans un projet différent et ne pas lui faire perdre son temps, mais aussi mettre à l’enquête publique un dossier qui comportera tous ces avis.
Le conseil municipal de la ou des communes d’implantation du projet, ainsi que les conseils municipaux des communes dans le rayon d’affichage de l’installation, devront rendre un avis sur la demande d’autorisation unique.
Toutes les autres consultations deviennent facultatives.
Il en est ainsi de l’INOQ (Institut national de l’origine et de la qualité), de l’ONF (Office national des forêts), de la CDCEA (Commission départementale de consommation des espaces agricoles). De même, la consultation du CODERST (Commission départementale de la nature, des paysages et des sites) ou de la CDNPS (Conseil Départemental de l’environnement et des risques sanitaires et technologiques) devient facultative. Le préfet pourra en tant que de besoin, et en fonction des enjeux locaux, saisir les commissions administratives qui sont susceptibles de rendre un avis éclairant sur le projet. Leur avis doit être transmis sous un mois, à défaut il est réputé favorable.
L’enquête publique est organisée dans les conditions des articles L. 123-1 et suivants du Code de l’environnement et des précisions du Décret. Le préfet n’a que 15 jours pour demander au président du tribunal administratif de désigner un commissaire enquêteur et une fois cette désignation faite, il a 15 jours pour décider de l’ouverture de l’enquête publique. L’enquête publique portera sur le projet dans sa globalité et sur les différents aspects qui font l’objet de la demande d’autorisation : permis de construire, défrichement, énergie, installations classées et espèces protégées. Le public sera amené à donner son avis sur tous ces aspects de la demande en une fois, et non pas de façon morcelée, afin d’avoir une vision d’ensemble des enjeux de façon globale.
Des délais d’instruction sont fixés par la réglementation à différentes étapes. L’objectif fixé est une instruction des dossiers de demande d’autorisation en 10 mois. Contrairement aux délais actuellement fixés pour l’instruction ICPE, il est prévu que les délais sont comptés dès la première réception du dossier, ce délai étant suspendu en cas de dossier incomplet, à compter de la demande de complément et jusqu’à la réception de ces compléments.
La durée maximale globalement prévue pour la phase de recevabilité est fixée à 4 mois incluant la vérification sous 1 mois du caractère complet du dossier et la production de l’avis de l’autorité environnementale, sachant que le préfet peut refuser l’autorisation dès cette phase, s’il apparaît que celui-ci demeure manifestement insuffisant ou contraire à la réglementation.
Le délai pour la phase de préparation de la décision préfectorale, une fois achevées les consultations et l’enquête publique, est fixé au délai maximal de 3 mois à compter de la réception du rapport du commissaire enquêteur. La prolongation de ce délai est possible avec l’accord du demandeur s’il apparaît nécessaire d’améliorer le projet ou de poursuivre la concertation. A l’expiration de ce délai, le projet fait l’objet d’un refus tacite.
L’arrêté préfectoral d’autorisation unique comporte différentes prescriptions comme c’est déjà le cas pour les autorisations ICPE actuelles qui pourront, en tant que de besoin, être complétées pour renforcer les mesures de prévention s’il apparaît que celles-ci sont insuffisantes. En application de l’article 23 du Décret des arrêtés complémentaires peuvent être pris sur demande de l’exploitant ou sur proposition des services concernés.
L’annulation de l’arrêté d’autorisation pourra être demandée dans un délai de deux mois à compter de la notification (pour l’exploitant) ou de la publication (pour les tiers) dudit arrêté. Ce délai correspond au délai de recours de droit commun.
Le régime de plein contentieux des ICPE s’applique à cette nouvelle autorisation. Le juge bénéficiera donc de pouvoirs étendus (refuser l’autorisation, délivrer l’autorisation et imposer des prescriptions, réformer l’autorisation, etc.) pour l’ensemble des facettes de l’autorisation alors que le défrichement, le permis de construire et les dérogations espèces protégées sont actuellement sous le régime de l’excès de pouvoir.
Le délai de caducité de trois ans des ICPE est repris pour l’autorisation unique. Ce délai pose des difficultés particulières pour les projets éoliens lorsque les délais de réalisation des raccordements électriques sont supérieurs.
A cette fin, l’Article 45 du Décret prévoit la possibilité dans ce cas particulier de prolonger ce délai dans la limite d'un délai total de dix ans, incluant le délai initial de trois ans. Cette prolongation par le préfet intervient sur demande de l'exploitant, en l'absence de changement substantiel de circonstances de fait et de droit ayant fondé l'autorisation, lorsque, pour des raisons indépendantes de sa volonté, l'exploitant n'a pu mettre en service son installation dans ce délai, le cas échéant après prorogation de l'enquête publique. La prorogation de l'enquête publique est acquise si aucune décision n'a été adressée à l'exploitant dans le délai de deux mois à compter de la date de l'avis de réception par le préfet.
Schéma de la Procédure d'autorisation unique
Dépôt de l'autorisation unique : liste des guichets uniques
Liste des services pour des questions techniques liées aux ICPE