22 mars 2019
France | Droit Public & Environnement | Urbanisme
Le Conseil d’Etat précise le régime de responsabilité du maire en cas de refus de faire procéder d'office à l’exécution d’un jugement pénal ordonnant la démolition d'une construction illégale. Le juge admet une possibilité de régularisation d'une construction dont la démolition a été ordonnée (décision du 13 mars 2019).
En synthèse, un propriétaire avait été condamné par le tribunal correctionnel à démolir l'extension d'une maison réalisée sans permis de construire. La maison a ensuite fait l'objet d'une vente judiciaire par adjudication au profit d'une autre personne qui n'a ni procédé à la démolition de l'extension ni entrepris de régulariser les travaux. Le voisin de l'extension litigieuse a demandé en vain au maire de procéder à la démolition de l'extension irrégulière sur le fondement de l'article L. 480-9 du code de l'urbanisme. Il a alors demandé au juge administratif de condamner l'Etat à lui verser une somme de 100.000 euros en réparation du préjudice subi du fait de sa carence à faire exécuter le jugement du tribunal correctionnel. Les juges du fond ayant rejeté sa demande, il se pourvoit en cassation.
Le Conseil d'Etat rappelle qu'il appartient au maire ou au fonctionnaire compétent, de sa propre initiative ou sur la demande d'un tiers, de faire procéder d'office à tous travaux nécessaires à l'exécution de cette décision de justice, sauf si des motifs tenant à la sauvegarde de l'ordre ou de la sécurité publics justifient un refus.
Dans le cas où, sans motif légal, l'administration refuse de faire procéder d'office aux travaux nécessaires à l'exécution de la décision du juge pénal, sa responsabilité pour faute peut être poursuivie.
En cas de refus légal, et donc en l'absence de toute faute de l'administration, la responsabilité sans faute de l'Etat peut également être recherchée, sur le fondement du principe d'égalité devant les charges publiques, par un tiers qui se prévaut d'un préjudice revêtant un caractère grave et spécial.
En outre, le Conseil d'Etat précise ici le sort que doit réserver l'administration à une demande d'autorisation d'urbanisme sollicitée pour faire obstacle à l'exécution d'un jugement pénal ordonnant une démolition ou une remise en état. Saisie d'une telle demande, l'autorité compétente n'est pas tenue de la rejeter. Il lui appartient d'apprécier l'opportunité de délivrer une telle autorisation de régularisation, compte tenu de la nature et de la gravité de l'infraction relevée par le juge pénal, des caractéristiques du projet soumis à son examen et des règles d'urbanisme applicables.
Par Alexandre Gauthier, associé et Alice Le Néel, collaboratrice, membres de la ligne de métiers Droit Public & Environnement de Gide.