25 octobre 2018
France | Concurrence & Distribution | Revue LSA
Cet article a été rédigé par Franck Audran, counsel de Gide spécialisé en droits français et communautaire de la concurrence, et publié par la revue LSA le 25 octobre dernier.
La loi n° 2018-670 du 30 juillet 2018 sur le secret des affaires offre un outil nouveau aux entreprises à la tête d’un réseau de franchise pour lutter contre l'utilisation illicite de leur savoir-faire.
Elément fondamental de la franchise, le savoir-faire transmis aux franchisés bénéficiera ici d’une protection renforcée dès lors que le franchiseur prendra toutes les précautions pour veiller à ce que l’ensemble des éléments de savoir-faire soient couverts par le secret des affaires.
En effet, cette loi prévoit qu’est protégée au titre du secret des affaires toute information secrète qui aurait fait l’objet de la part de son détenteur de mesures de protection raisonnables pour en conserver le secret1. Il reviendra ainsi au franchiseur d’être diligent sur les mesures de protection raisonnables à accomplir pour garantir la confidentialité des éléments d’un savoir-faire vis-à-vis des franchisés de son réseau et lorsque ces derniers auront pu décider de quitter ce réseau.
Par exception, des informations relevant du savoir-faire peuvent être considérées avoir été obtenues licitement lorsqu’elles sont « de façon licite en possession de la personne qui obtient l'information, sauf stipulation contractuelle interdisant ou limitant l'obtention du secret »2. Il est dès lors essentiel de limiter contractuellement l’utilisation par les franchisés des éléments de savoir-faire transmis à la seule exploitation du concept développé par l’enseigne concernée pendant et au terme du contrat de franchise. Outre les clauses et accords de confidentialité renforcés portant sur les éléments de savoir-faire et les services offerts par un franchiseur à ses franchisés, il pourrait être opportun de mentionner dans le contrat de franchise les éléments et supports du savoir-faire qui revêtent un caractère secret ou de transmettre ces informations via des plateformes de partage sécurisées dédiées, etc.
La loi sur le secret des affaires offre de surcroit aux entreprises des leviers d’action efficaces pour dissuader et combattre l’utilisation des informations sensibles à des fins autres que celles envisagées par le franchiseur. Est ainsi instauré un régime de responsabilité spécifique qui ne se limite plus aux traditionnels dommages et intérêts compensatoires, mais qui vient sanctionner la faute lucrative en permettant à la victime de demander réparation au titre des « bénéfices réalisés par l'auteur de l'atteinte au secret des affaires »3.
Enfin, le législateur a pris le soin de prévoir expressément l’ensemble des mesures de prévention ou de cessation des comportements répréhensibles que la victime d’une violation du secret des affaires peut demander, allant de l’interdiction des actes d’utilisation des éléments relevant du secret des affaires à la cessation des activités et des offres commerciales litigieuses4.
Pour éviter les abus, le législateur a néanmoins souhaité sanctionner toute demande dilatoire sur le fondement de la protection du secret des affaires d’une amende d’un montant maximum de 60.000€. Les franchiseurs devront ainsi s’assurer, préalablement à toute action à l’encontre d’un ancien franchisé qui aurait illicitement utilisé le savoir-faire, que ce dernier était toujours contractuellement tenu au moment où l’action est intentée.
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1. Article L. 151-1 du code de commerce
2. Article L. 151-3 du Code de commerce.
3. Article L. 152-6 du Code de commerce.
4. Article L. 152-3 du Code de commerce.