19 novembre 2020
Commentaire de l’ordonnance n° 2020-1402 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif et du décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif.
En raison de la réinstauration de l’état d’urgence sanitaire, le Gouvernement a publié, le 19 novembre 2020, l’ordonnance n° 2020-1402 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif. Cette ordonnance, qui déroge à des normes de valeur législative, a été publiée concomitamment au décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif, qui adapte des normes de valeur réglementaire.
Ces deux textes entrent en vigueur dès le 20 novembre 2020 et s’appliquent à l’ensemble des juridictions de l’ordre administratif jusqu’à la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire déclaré par le décret n° 2020-1257 du 14 octobre 2020, prorogations comprises. A ce jour, ces mesures transitoires seront donc applicables jusqu’au 16 février 2021 inclus, conformément à l'article 1er de la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020.
A titre liminaire, il est notable qu'aucun de ces deux textes du 18 novembre 2020 ne prolonge les délais de recours devant les juridictions administratives, contrairement à ce qui avait été prévu durant le premier confinement, qui était certes plus strict.
Tout d'abord, l'ordonnance et le décret précités prévoient des mesures visant à limiter la tenue d'audiences physiques rassemblant l'ensemble des intervenants habituels.
Ainsi, le président de la formation de jugement peut décider, sans qu’aucun recours soit possible contre cette décision, que l'audience se tiendra par visioconférence ou, en cas d’impossibilité technique ou matérielle et lorsque les parties ou leurs avocats le demandent, par d'autres moyens de télécommunication, y compris par téléphone.
En toute hypothèse, le moyen de télécommunication choisi doit permettre de s’assurer de l’identité des parties et de leurs avocats ainsi que de garantir la qualité de la transmission et la confidentialité des échanges entre les parties et leurs avocats. La présence physique des conseils ou des interprètes aux côtés des parties n’est pas requise.
L'une des mesures les plus dérogatoires est la faculté pour le juge des référés de statuer sans audience, par ordonnance motivée, notamment sur les requêtes en référé-liberté ou en référé-suspension. Alors que l'oralité a une place déterminante dans ces procédures, il est regrettable que le texte ne prévoie pas que les parties et leurs conseils puissent s'opposer à une telle mesure. Il faut espérer par conséquent que les magistrats feront une application mesurée de cette faculté. La justification d'une telle dérogation est d'ailleurs contestable, dès lors que l'ordonnance permet également aux magistrats statuant seuls, avec l'accord du président de la juridiction, de tenir leurs audiences à distance, y compris depuis leur domicile.
Le décret du 18 novembre 2020 prévoit également que les demandes de sursis à exécution de jugements rendus en première instance puissent être jugées sans audience publique.
Ce décret allège en outre d'autres règles procédurales, dont les plus notables sont exposées ci-après.
Le décret prévoit ainsi que lorsqu'un partie est représentée par un avocat, la notification des décisions des juridictions administratives sera valablement accomplie "par l'expédition de la décision" à l'avocat. Le choix de cette formule est discutable car elle crée un doute sur la date à laquelle le délai de recours devra être décompté. Ce délai débutera-t-il dès l'expédition de la décision et donc avant la réception de l'acte, contrairement aux principes généraux du contentieux administratif ? Ou bien commencera-t-il à la date de première consultation de la décision sur Télérecours et, à défaut de consultation dans un délai de deux jours ouvrés, à l'issue de ce délai (par analogie avec l'article R. 611-8-2 du code de justice administrative qui ne régit pas la notification des jugements et, surtout, avec l'article R. 751-4-1 du même code qui n'est en principe pas applicable aux avocats) ?
S'agissant des parties non représentées par un avocat et n'utilisant ni Télérecours, ni Télérecours Citoyens, la notification pourra être réalisée par tout moyen de nature à attester la date de réception, et non seulement par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.
Par ailleurs, la communication des pièces, actes et avis aux parties pourra temporairement être effectuée par tout moyen, de manière, vraisemblablement, à permettre leur envoi par courriel aux parties non inscrites sur Télérecours.
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