Analyses & décryptages

Covid-19 | Mesures d’urgence relatives aux instances représentatives du personnel

Cette publication a été mise à jour le 9 juillet 2020.

L’article 11 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19 autorise le Gouvernement à modifier par voie d’ordonnance « les modalités d’information et de consultation des instances représentatives du personnel, notamment du comité social et économique, pour leur permettre d’émettre les avis requis dans les délais impartis, et de suspendre les processus électoraux des comités sociaux et économiques en cours ».

C’est dans ce contexte que l’ordonnance n° 2020-389 du 1er avril 2020 (l’ »Ordonnance IRP« ) a été publiée au Journal Officiel du 2 avril 2020 et est entrée en vigueur le 3 avril 2020, modifiée par l’ordonnance n° 2020-560 du 13 mai 2020, entrée en vigueur le lendemain.

SUSPENSION DES PROCESSUS ÉLECTORAUX

L’Ordonnance IRP prévoyait la suspension des processus électoraux en cours ou envisagés à compter du 12 mars 2020, jusqu’au terme d’une période de trois mois à compter de la fin de l’état d’urgence sanitaire.

La prolongation de l’état d’urgence sanitaire jusqu’au 10 juillet 2020 prévue par la loi 2020-546 du 11 mai 2020 aurait dû entraîner mécaniquement un report de la reprise des élections professionnelles. Cependant, afin de garantir que les élections professionnelles suspendues ou reportées se tiennent dans des délais permettant leur prise en compte au titre du 3ème cycle de la mesure de l’audience syndicale, c’est-à-dire avant le 31 décembre 2020, l’ordonnance n° 2020-560 du 13 mai 2020 fige les échéances aux dates applicables avant l’intervention de la loi prorogeant l’état d’urgence sanitaire et suspend les processus électoraux en cours jusqu’au 31 août 2020 inclus.

Cependant, en raison de l’amélioration de la situation sanitaire, l’ordonnance n° 2020-737 du 17 juin 2020 prévoit que l’employeur puisse anticiper la reprise des processus électoraux. Cette reprise doit, bien entendu, se faire dans le respect des préconisations sanitaires destinées à protéger la santé des personnes.

Ainsi, l’employeur peut décider que la suspension du processus électoral prend fin à compter d’une date qu’il fixe librement entre le 3 juillet et le 31 août 2020.

Dans ce cas, il doit en informer, au moins 15 jours avant la date fixée pour la reprise du processus, par tout moyen donnant date certaine à la réception de cette information :

  • les syndicats concernés, à savoir : les syndicats reconnus représentatifs dans l’entreprise ou l’établissement, ceux y ayant constitué une section syndicale, ceux affiliés à une organisation syndicale représentative au niveau national et interprofessionnel et ceux qui satisfont aux critères de respect des valeurs républicaines et d’indépendance, légalement constitués depuis au moins 2 ans et dont le champ professionnel et géographique couvre l’entreprise ou l’établissement concerné (article L 2314-5, al. 1 et 2 du Code du travail) ;
     
  • l’autorité administrative lorsque celle-ci a été saisie d’éventuelles contestations de la décision de l’employeur ou d’un des employeurs mandatés par les autres déterminant le nombre et le périmètre des établissements distincts (articles R 2313-1, R 2313-2, R 2313-4 et R 2313-5 du Code du travail) ou lorsqu’elle a été saisie pour fixer la répartition du personnel dans les collèges électoraux et la répartition des sièges entre les différentes catégories de personnel (article R 2314-3 du Code du travail).

Si le processus électoral a déjà donné lieu à l’accomplissement de certaines formalités entre le 12 mars et le 3 avril 2020, la suspension prend effet à compter de la date la plus tardive à laquelle l’une de ces formalités a été réalisée.

L’Ordonnance IRP précise que cette suspension affecte :

  • les délais impartis à l’employeur pour organiser les élections ;
     
  • les délais dans lesquels l’autorité administrative et le juge judiciaire doivent être saisis d’éventuelles contestations relatives aux élections ;
     
  • les délais impartis à l’autorité administrative pour se prononcer sur ces éventuelles contestations.

Lorsque l’autorité administrative a été saisie ou s’est prononcée après le 12 mars 2020, le délai dont elle dispose pour se prononcer et le délai pour contester sa décision commencent à courir à la date de fin de la suspension du processus électoral (soit, au plus tard, à compter du 31 août 2020).

EFFETS DE LA SUSPENSION

L’Ordonnance IRP précise que si la suspension des élections intervient entre le premier et le second tour, la régularité du premier tour ne sera pas remise en cause.

Par ailleurs, l’obligation d’organiser des élections partielles est supprimée, que le processus électoral ait déjà été engagé ou non, lorsque le mandat des membres du CSE expire moins de six mois après la date de fin de la suspension du processus électoral.

L’Ordonnance IRP rappelle en outre que les conditions d’électorat et d’éligibilité s’apprécient à la date de chacun des deux tours de scrutin. Ainsi, si en raison de la suspension ou du report des élections professionnelles, le second tour a lieu plusieurs mois après le premier tour, il conviendra de réexaminer les conditions d’électorat et d’éligibilité à cette date.

PROROGATION DES MANDATS EN COURS DES REPRÉSENTANTS ÉLUS

L’Ordonnance IRP prévoit, en cas de suspension ou report du processus électoral, la prorogation des mandats des représentants en place au 12 mars 2020 jusqu’à la proclamation des résultats du premier, ou le cas échéant, du second tour des élections professionnelles.

L’Ordonnance IRP confirme qu’ils demeurent protégés contre la rupture de leur contrat de travail et l’interruption ou le non-renouvellement d’une mission de travail temporaire s’agissant des intérimaires.

VISIOCONFÉRENCE, CONFÉRENCES TÉLÉPHONIQUES ET MESSAGERIE INSTANTANÉE

L’Ordonnance IRP renforce les mécanismes de réunion à distance et autorise ainsi, de manière dérogatoire et après une simple information des membres du CSE, le recours :

  • à la visioconférence (sans limitation, contrairement au droit commun),
  • aux conférences téléphoniques,
  • voire à un système de messagerie instantanée, en cas d’impossibilité de recourir aux deux précédents moyens ou lorsqu’un accord d’entreprise le permet.

Ces règles s’appliquent à l’ensemble des réunions des institutions représentatives du personnel convoquées pendant la période de l’état d’urgence sanitaire.

Le décret n° 2020-419 du 10 avril 2020 relatif aux modalités de consultation des instances représentatives du personnel pendant la période de l’état d’urgence sanitaire précise notamment que lorsque la réunion est tenue :

  • en conférence téléphonique, le dispositif technique mis en œuvre doit garantir l’identification des membres de l’instance, ainsi que leur participation effective en assurant la retransmission continue et simultanée du son des délibérations ;
  • par messagerie instantanée, le dispositif technique mis en œuvre doit garantir l’identification des membres de l’instance, ainsi que leur participation effective en assurant la communication instantanée des messages écrits au cours des délibérations.

En outre, le décret prévoit que la réunion par messagerie instantanée doit se tenir en 4 étapes :

  1. vérification que l’ensemble des membres de l’instance a accès à un dispositif technique remplissant les conditions rappelées ci-dessus ;
  2. clôture des débats par message du président de l’instance, laquelle ne peut intervenir avant l’heure limite fixée pour la clôture de la délibération ;
  3. vote de manière simultanée des membres lesquels disposent d’une durée identique pour voter à compter de l’ouverture des opérations de vote indiquée par le président ;
  4. transmission des résultats par le président de l’instance à l’ensemble de ses membres au terme du délai fixé pour l’expression des votes.

INFORMATION PRÉALABLE DU CSE ET CONSULTATION A POSTERIORI

L’ordonnance n° 2020-323 du 25 mars 2020 prévoit la possibilité pour l’employeur d’adopter des mesures d’urgences en matière de congés payés, durée du travail et jours de repos jusqu’au 31 décembre 2020 (voir ici).

Dans ce contexte, l’Ordonnance IRP prévoit l’information préalable du CSE mais, de façon dérogatoire, sa consultation peut être faite a posteriori dans le délai d’un mois à compter de cette information lorsque l’employeur met en œuvre au moins l’une des mesures suivantes :

  • imposition de jours de repos (RTT, jours octroyés dans le cadre d’une convention de forfait, droits affectés à un compte épargne temps) ou modification de leur date s’ils ont déjà été posés ;
     
  • dérogation aux durées maximales de travail ou au principe du repos dominical dans certains secteurs d’activité.

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