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Mesures d’aides d’Etat possibles en faveur des entreprises

Cette publication a été mise à jour le 14 avril 2020 avec les informations disponibles à cette date.

« La principale réponse budgétaire au coronavirus proviendra des budgets nationaux des États membres« [1]. « Les Etats membres peuvent concevoir de vastes mesures d’aide pour soutenir des entreprises ou des secteurs spécifiques souffrant des conséquences de l’épidémie de Covid-19[2], conformément au cadre existant de l’UE relatif aux aides d’Etat. »

Différents types d’aides peuvent être octroyés par les Etats pour soutenir financièrement les entreprises impactées par l’épidémie de Covid-19. Les conditions d’octroi et de compatibilité de ces différentes aides varient selon la base juridique employée.

Les développements qui suivent visent les aides au sens de l’article 107, paragraphe 1 du TFUE et soumises à l’obligation de notification préalable imposée aux Etats par l’article 108, paragraphe 3 du TFUE.

Les Etats peuvent toutefois octroyer d’autres mesures de soutien financier qui échappent à la qualification d’aide d’Etat et n’ont donc pas à être notifiées à la Commission. Ces mesures sont :

  • quelles que soient leur forme, toutes celles qui entrent dans la catégorie des aides « de minimis », à savoir celles dont le montant ne dépasse pas 200 000 euros sur trois ans pour une même entreprise[3]. Certains secteurs spécifiques, dont l’agriculture et la pêche, se voient appliquer un plafond inférieur[4]. De même, sont considérés comme « de minimis », les prêts inférieurs à 1 million d’euros sur cinq ans et les garanties de prêt couvrant un montant maximal de 1,5 million d’euros sur une période de 5 ans.
     
  • les prêts ou garanties de prêts consentis à des taux de marché.
     
  • tous les allègements ou exonérations fiscales (impôts sur les sociétés, TVA, …) et de cotisations sociales dès lors qu’elles bénéficient à l’ensemble des entreprises établies sur le territoire français.

Afin de traiter rapidement les demandes des Etats, la Commission a mis en place une adresse mail et une ligne téléphonique[5] dédiées aux questions des Etats sur les aides possibles dans le contexte de l’épidémie Covid-19 et s’est engagée à statuer sur les notifications des Etats dans des délais très courts.

1. AIDES FONDÉES SUR L’ARTICLE 107 (3) (C) DU TFUE DESTINÉES À APPORTER DE LA LIQUIDITÉ AUX ENTREPRISES

(1) Ces aides temporaires à la liquidité prennent la forme de garanties de prêts ou de prêts. Leurs conditions d’octroi sont prévues par les Lignes directrices concernant les aides d’Etat au sauvetage et à la restructuration d’entreprises en difficulté de 2014[6].

(2) Il n’est pas nécessaire que les entreprises bénéficiaires répondent à la définition « d’entreprises en difficulté » au sens de ces Lignes directrices. Il suffit qu’elles soient confrontées à des besoins de liquidité pressants découlant de circonstances exceptionnelles et imprévues.

(3) Les régimes d’aides de « soutien temporaire à la restructuration » pour les PME et petites entreprises publiques. L’Etat peut mettre en place un régime d’aide de « soutien temporaire à la restructuration » destiné à soutenir la restructuration d’entreprises pour rétablir leur viabilité à long terme. Seules les PME et les petites entreprises publiques peuvent bénéficier de ce soutien.

(4) Le montant de cette aide est plafonné à 10 millions d’euros par entreprise et ne peut être octroyée plus de dix-huit mois. Son octroi est notamment conditionné à la présentation d’un plan de restructuration dans les 6 mois suivant la date d’octroi.

(5) Les aides au sauvetage individuelles. Une aide au sauvetage est par nature urgente et transitoire. Son principal objectif est de permettre le maintien à flot d’une entreprise en difficulté pendant la courte période nécessaire à l’élaboration d’un plan de restructuration ou de liquidation. Cette aide offre également un soutien temporaire à une entreprise qui n’est pas en difficulté mais qui est confrontée à une grave détérioration de sa situation financière, se traduisant par une crise de liquidité grave ou une insolvabilité technique.

(6) Ces aides peuvent être octroyées à tous types d’entreprises, pour une durée maximale de six mois. Avant la fin de cette période, le prêt doit avoir été remboursé ou il doit avoir été mis fin à la garantie et l’Etat doit avoir approuvé un plan de restructuration ou de liquidation pour les entreprises en difficulté.

2. AIDES FONDÉES SUR L’ARTICLE 107 (2) (B) DU TFUE DESTINÉES À COMPENSER LES DOMMAGES CAUSÉS PAR DES CIRCONSTANCES EXCEPTIONNELLES

(7) Les Etats membres peuvent recourir à l’article 107, paragraphe 2, sous b) du TFUE qui autorise les aides destinées à remédier aux dommages causés par des évènements extraordinaires.

(8) Cette base juridique permet d’indemniser les dommages causés directement par des événements extraordinaires, tels que ceux découlant de l’épidémie de Covid-19.

(9) Elle peut être utilisée à titre individuel pour une entreprise spécifique ou concerner un secteur entier par la mise en place d’un régime d’aide. Tous les secteurs peuvent en bénéficier, y compris le transport, la vente au détail, les hôpitaux, l’évènementiel et le tourisme.

(10) Considérant que la crise sanitaire du Covid-19 entre dans le champ de cette dérogation, en ce qu’elle constitue un événement extraordinaire, la Commission a autorisé sur ce fondement le premier régime d’aide lié au Covid-19, mis en place par le Danemark[7] visant à indemniser les entreprises organisatrices d’évènements publics pour les pertes causées par les annulations.

(11) Elle a autorisé, sur ce même fondement, deux autres régimes d’aide danois, l’un visant à indemniser les travailleurs indépendants de la perte de leur chiffre d’affaires[8], l’autre à couvrir les coûts fixes supportés par les entreprises ayant perdu 40% de leurs revenus entre le 9 mars et le 9 juin 2020 [9], ainsi que le premier régime d’aide au secteur aérien, mis en place par la France [10]

(12) Pour pouvoir octroyer une aide sur ce fondement, l’Etat doit démontrer l’existence d’un lien de causalité direct entre l’épidémie de Covid-19 et les dommages subis ainsi qu’entre les dommages et l’aide envisagée. L’Etat devra apporter des informations détaillées sur le type de dommages à indemniser (pertes de recettes, coûts supplémentaires, …) ainsi que sur la méthodologie utilisée pour évaluer les dommages.

(13) Le montant de l’aide peut couvrir jusqu’à 100 % des coûts liés au dommage, mais doit rester proportionnelle au dommage causé, sans le surcompenser. Elle ne peut pas être cumulée avec d’autres aides sur les mêmes coûts éligibles.

(14) Cette aide peut être cumulée avec d’autres types d’aides (notamment des aides fondées sur l’article 107, paragraphe 3, sous b) du TFUE, voir ci-dessous), sous réserve qu’elles ne portent pas sur les mêmes coûts éligibles.

(15) Elle peut par ailleurs être octroyée aux entreprises ayant bénéficié d’une aide au sauvetage ou à la restructuration ces dix dernières années. En d’autres termes, le recours à cette base juridique permet de déroger au principe « one time, last time » qui interdit l’octroi d’une nouvelle aide au sauvetage ou à la restructuration pendant dix ans.

(16) Afin d’aider les Etats à mettre rapidement en place ce type d’aide, la Commission a publié une fiche sur les informations obligatoires à lui notifier, pour l’octroi d’une aide sur le fondement de l’article 107, paragraphe 2, sous b) du TFUE.

(17) S’agissant en particulier du secteur des transports (aéroports, assistance en escale, compagnies aériennes, maritimes, transport ferroviaire et terrestre, etc.), l’analyse sera faite au cas par cas.

(18) Les Etats sont notamment tenus d’apporter des justifications précises sur (i) les pertes de recettes et les coûts non encourus, directement liés à l’épidémie de Covid-19, (ii) la définition de la période de référence (situation comparable en l’absence de l’épidémie) et (iii) la définition du dommage causé en comparant la situation liée à l’épidémie avec celle de la période de référence.

3. AIDES FONDÉES SUR L’ARTICLE 107 (3) (B) DU TFUE DESTINÉES À REMÉDIER À UNE PERTURBATION GRAVE DE L’ÉCONOMIE D’UN ÉTAT

(19) Comme annoncé par la Vice-Présidente de la Commission européenne, M. Vestager, le 17 mars 2020[11], la Commission a adopté un Encadrement temporaire concernant les aides d’Etat destinées à soutenir l’économie dans le contexte de l’épidémie de COVID-19 (ci-après, « l’Encadrement »).

(20) Cet Encadrement présente les mesures financières exceptionnelles que les Etats peuvent octroyer aux entreprises sur deux fondements : l’article 107, paragraphe 3, sous b) du TFUE pour remédier à une perturbation grave de leur économie, liée à l’épidémie du Covid-19 ; et l’article 107, paragraphe 3, sous c) du TFUE faciliter le développement de certaines activités.

(21) Le champ des mesures couvertes par cet Encadrement a été étendu le 3 avril 2020[12]. Concrètement, les Etats peuvent octroyer:

  • jusqu’à 800 000 euros d’aide par entreprise (excepté dans le secteur agricole, de la pêche et de l’aquaculture[13]) sous forme de subventions directes, d’avances remboursables, d’avantages fiscaux, de garanties (couvrant 100% du risque), de prêts (à taux zéro) et de fonds propres dans le cadre d’un régime d’aide.
     
  • des garanties d’Etat sur les prêts individuels contractés par les entreprises auprès des banques en réaction à la pandémie de Covid-19. L’Encadrement fixe les primes de garanties minimum pour les PME et grandes entreprises, cette prime s’accroît à mesure que la durée du prêt garanti augmente. La durée de la garantie est en principe limitée à six ans maximum et ne devrait pas couvrir plus de 90% du prêt lorsque les pertes sont supportées proportionnellement et dans les mêmes conditions par l’Etat et l’établissement de crédit ou 35% si les pertes sont imputées en premier lieu à l’Etat.
     
  • des prêts publics avec des taux d’intérêt réduits, au moins égaux au taux de base (IBOR à 1 an) applicable au 1er janvier 2020, majoré des marges de risque de crédit prévues par l’Encadrement. La durée des prêts devrait être en principe de six ans maximum.
     
  • des conditions assouplies pour l’octroi d’assurances-crédits à l’exportation à court terme, notamment sur la démonstration de l’absence de couverture des risques non cessibles. A cet égard, la Commission a modifié sa Communication relative à l’assurance-crédit à l’exportation à court terme en retirant temporairement tous les pays de la liste des pays à risques cessibles pour augmenter la disponibilité des organismes publics d’assurance-crédit à l’exportation à court terme.

Pour les garanties (b) et prêts à taux réduits (c), le montant du prêt maximal dépend de sa date d’échéance. Si le prêt arrive à échéance après le 31 décembre 2020, le montant du prêt ne pourra excéder le double de la masse salariale annuelle du bénéficiaire pour 2019 ou 25% du chiffre d’affaires total en 2019 ou être majoré pour couvrir les besoins de liquidités de l’entreprise, pendant 12 à 18 mois suivant la date de l’octroi du prêt respectivement aux PME et grandes entreprises.  

  • des conditions assouplies pour l’octroi d’assurances-crédits à l’exportation à court terme, notamment sur la démonstration de l’absence de couverture des risques non cessibles. A cet égard, la Commission a modifié sa Communication relative à l’assurance-crédit à l’exportation à court terme en retirant temporairement (jusqu’au 31 décembre 2020) tous les pays de la liste des pays à risques cessibles pour augmenter la disponibilité des organismes publics d’assurance-crédit à l’exportation à court terme.
     
  • des reports de paiement des impôts ou des taxes et/ou des cotisations de sécurité sociale dans le cadre de régimes. La date limite de report ne pourra être postérieure au 31 décembre 2022.
     
  • des subventions salariales en faveur des salariés, dans le cadre de régimes. Ces aides doivent viser à éviter les licenciements et sont octroyées pendant douze mois maximum. La subvention couvre au maximum 80% du salaire brut mensuel (y compris les cotisations patronales de sécurité sociale) du personnel bénéficiaire. Pendant cette période, l’emploi du personnel qui en bénéficie doit être maintenu.
     
  • des aides à la R&D portant sur le Covid-19 et sur d’autres éléments liés à la lutte contre le virus[14], sous forme de subventions directes, d’avances remboursables ou d’avantages fiscaux.
     
  • des aides à l’investissement, sous forme de subventions directes, d’avantages fiscaux ou d’avances remboursables pour la construction ou la mise à niveau d’infrastructures d’essai et de développement nécessaires pour mettre au point, tester et développer, jusqu’au premier déploiement industriel précédant la production en série, des produits liés au COVID-19.
     
  • des aides à l’investissement, sous forme de subventions directes, d’avances remboursables ou d’avantages fiscaux, en faveur de la fabrication de produits liés à la COVID-19 (médicaments, principes pharmaceutiques actifs et matières premières, équipement hospitalier et médical,…).

(22) La Commission pourrait, dans les prochains jours, élargir le champ des aides possibles et permettre aux Etats de recapitaliser les entreprises. Une proposition de texte en ce sens est en cours de consultation par les Etats membres[15].

(23) Toutes ces aides peuvent être cumulées entre elles à l’exception (i) des garanties d’Etat mentionnées au b) ci-dessus et des prêts à taux réduits mentionnés au c) ci-dessus si ces mesures concernent le même prêt et que le montant total du prêt excède les seuils fixés par l’Encadrement et (ii) des mesures spécifiquement liées à la R&D et à l’investissement dans des projets et produits liés au Covid-19 (mentionnées au g), h) et i) ci-dessus) lorsqu’elles portent sur les mêmes coûts admissibles.

(24) Toutes ces aides peuvent par ailleurs être cumulées avec des aides de minimis.

(25) Les aides sous forme de garanties et de taux d’intérêts réduits en faveur des entreprises sont également susceptibles d’aider les banques. L’Encadrement précise que ce type d’aide est considéré comme une aide directe aux clients des banques et non aux banques elles-mêmes. Ces dernières devraient mettre en œuvre un mécanisme garantissant que les avantages sont répercutés dans la plus large mesure possible sur les bénéficiaires finaux (volumes de financement plus élevés, financements plus risqués, exigences de garantie moins élevées, taux d’intérêts moins élevés).

(26) La Commission a publié, à l’attention des Etats membres, le formulaire de notification obligatoire pour les aides qu’ils souhaiteraient octroyer sur le fondement de l’article 107, paragraphe 3, sous b) du TFUE.

(27) Ces aides pourront être octroyées jusqu’au 31 décembre 2020.

(28) Seules les entreprises qui sont entrées en difficulté après le 31 décembre 2019 pourront bénéficier d’une aide au titre de l’Encadrement temporaire, afin de garantir qu’il ne soit pas utilisé pour des cas sans rapport avec l’épidémie de Covid-19.

(29) Les régimes d’aides notifiés par les Etats et autorisés par la Commission européenne, à date, sur le fondement de l’Encadrement temporaire et de l’article 107, paragraphe 2, sous b) TFUE sont listés en Annexe 1. Les régimes d’aides mis en place par la France sont présentés de façon synthétique en Annexe 2.

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[1] Extrait du communiqué de presse de la Commission du 13 mars 2020, intitulé « COVID-19: la Commission présente une réponse européenne coordonnée pour lutter contre l’impact économique du coronavirus* ».
[2] Extrait du Q&A publié par la Commission le 13 mars 2020 concernant la « réaction européenne coordonnée sur le coronavirus ».
[3] Règlement (UE) n° 1407/2013 de la Commission du 18 décembre 2013 relatif à l’application des articles 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne aux aides de minimis, JO L 352 du 24.12.2013, p. 1.
[4] Pour les entreprises exerçant des activités de transport de marchandises par route pour compte d’autrui, le plafond est abaissé à 100.000 euros. Il existe par ailleurs trois autres régimes d’aides de minimis dont les plafonds individuels sont de 15.000 € pour le secteur de l’agriculture (règlement n° 1408/2013); 30.000 € pour le secteur de la pêche et de l’aquaculture (règlement n° 717/2014); 500.000 € pour les entreprises fournissant des services d’intérêt économique général (SIEG) (règlement n° 360/2012).
[5] T. +32 2 296 52 00 | e-mail : COMP-COVID@ec.europa.eu.
[6] JO C 249 du 31.7.2014, p. 1.
[7] Décision de la Commission du 12 mars 2020, SA.56685 – DK – Compensation scheme for cancellation of events related to COVID-19.
[8] Décision de la Commission du 25 mars 2020, SA.56791 -DK – Temporary compensation scheme for self-employed financially affected by the COVID 19.
[9] Décision de la Commission du 08 avril 2020, SA.56774 – DK.
[10] Décision de la Commission du 31 mars 2020, SA.56765 – CODIV-19 Moratoire sur le paiement de taxes et redevances aéronautiques en faveur des entreprises de transport public aérien sous licences d’exploitation délivrées par la France.
[11] Déclaration du 17 mars 2020
[12] JOUE  112I , 4.4.2020, p. 1
[13] Pour ces secteurs, les montants sont réduits et les conditions d’octroi plus strictes.
[14] Recherche sur les vaccins, les médicaments et les traitements, les dispositifs médicaux et l’équipement hospitalier et médical, les désinfectants, les vêtements et équipements de protection et les innovations de procédé permettant une fabrication efficiente des produits nécessaires.
[15] Communiqué de presse du 09.04.2020

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