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Contreparties centrales : ce qu’il faut savoir sur le nouveau dispositif européen encadrant le traitement de leurs difficultés financières

16 décembre 2020, Règlement 2021/23 publié au JOUE L 22/1 du 21 janvier 2021

Les contreparties centrales (CCP) interviennent, par voie d’imposition, entre les acheteurs et les vendeurs d’instruments financiers, cotés ou négociés de gré à gré, et centralisent ainsi les risques inhérents aux transactions. Le dispositif qui leur est applicable a été institué postérieurement à la crise de 2008, par le Règlement EMIR du 4 juillet 2012. Celui-ci est désormais complété par le Règlement du 16 décembre 2020 qui vise à contribuer à la résilience des contreparties centrales par la mise en place d’un régime de résolution.

Ce nouveau règlement exclut l’application des textes relatifs à la résolution bancaire adoptés en 2014. Le schéma sur lequel est bâti le nouveau règlement est toutefois assez similaire à celui retenu pour la résolution des établissements de crédit. Par ailleurs, comme ce dernier, l’un des objectifs du nouveau texte est de protéger les fonds publics en limitant le recours à l’argent public.

Le règlement du 16 décembre 2020 comprend 97 articles qui sont répartis en 9 titres. Il entrera en vigueur, sauf exception, le 12 août 2022.

La résolution des contreparties centrales repose sur les autorités administratives

L’autorité de résolution peut être notamment une banque centrale ou une autorité administrative publique. Elle peut être distincte de l’autorité de supervision mais cette dernière est autorisée à exercer en même temps les fonctions de supervision et de résolution.

Cette autorité doit agir en lien avec les autorités mises en place en application du règlement EMIR. Les autorités européennes de supervision ne sont pas sans rôle. L’ESMA doit mettre en place, en son sein, un comité de résolution chargé de préparer les décisions confiées à cette autorité par le règlement du 16 décembre 2020.

Le traitement des difficultés des contreparties centrales est préparé en amont

La préparation du traitement des difficultés des contreparties centrales repose sur deux piliers : les plans et la résolvabilité.

Il y a deux sortes de plan : les plans de redressement élaborés par les contreparties centrales et soumis à l’autorité de supervision ; les plans de résolution établis par les autorités de résolution. Ces plans doivent prévoir les mesures à prendre en cas de défaillance, étant précisé que le rétablissement des contreparties centrales doit normalement intervenir sans aucun soutien financier public.

Les mesures mentionnées dans les plans doivent être prises en tenant compte de l’évaluation de la résolvabilité des contreparties centrales. Cette évaluation a pour objectif de vérifier qu’il n’y a pas d’obstacle à la mise en œuvre des instruments de résolution. S’il y en a, ils doivent être supprimés.

L’intervention précoce est encadrée

Des mesures d’intervention précoces sont diverses. La destitution d’un dirigeant ou la mise en œuvre d’une mesure définie dans le plan de redressement sont des illustrations. 

L’intervention précoce est subordonnées à l’une des conditions suivantes :

– la CCP enfreint ou est susceptible, dans un proche avenir, d’enfreindre les exigences prudentielles et de capital du règlement (UE) n° 648/2012 ;

– la CCP représente un risque pour la stabilité financière au sein de l’Union ou de l’un ou plusieurs de ses États membres ;

 – l’autorité compétente a relevé d’autres indices d’une situation de crise émergente qui pourrait affecter les activités de la CCP, en particulier, sa capacité à fournir des services de compensation.

La procédure de résolution constitue un traitement administratif des difficultés

L’autorité de résolution est le rouage essentiel de la procédure de résolution. Le juge a un rôle très limité.

La procédure de résolution poursuit certains objectifs, tel que la continuité des fonctions critiques des contreparties centrales. Elle est encadrée par des principes généraux, notamment en ce qui concerne l’ordre des personnes devant supporter les pertes, les actionnaires supportant les pertes en premier et les créanciers intervenant après.

Les instruments de résolution sont au nombre de 4 ; les instruments de répartition des positions et des pertes, l’instrument de dépréciation et de conversion, l’instrument de cession des activités et l’instrument de la CCP-relais :

  • Les instruments de répartition des positions et de répartitions des pertes, dont la mise en œuvre peut conduire l’autorité de résolution à résilier les contrats conclus avec les membres compensateurs défaillants, ont notamment pour objectif de couvrir les pertes des CCP et de restaurer leur capacité à honorer leurs obligations de paiement à échéance;
  • L’instrument de dépréciation et de conversion, qui concerne notamment les actions et les instruments de dette, a en particulier pour objectif d’absorber les pertes et de recapitaliser la CCP ;
  • L’instrument de cession des activités implique un transfert de propriété, notamment des actions de la CCP, à un acquéreur autre qu’une CCP-relais.
  • L’instrument de la CCP-relais a le même objet que l’instrument de cession des activités, notamment un transfert des actions.

Le soutien financier public n’est pas un instrument de résolution même s’il n’est pas totalement écarté.

L’autorité de résolution est investie de pouvoirs dits de résolution

Les pouvoirs de résolution sont au service de l’autorité de résolution afin que celle-ci puisse appliquer efficacement les instruments de résolution qu’elle a à sa disposition. Le règlement distingue les pouvoirs généraux – comme par exemple le pouvoir de prendre le contrôle de la CCP, celui de réduire à zéro le capital social ou encore celui de liquider et résilier les contrats financiers – des pouvoirs auxiliaires, tel que celui d’« annuler ou modifier les clauses d’un contrat auquel la CCP soumise à une procédure de résolution est partie ou substituer l’acquéreur ou la CCP-relais à la CCP soumise à une procédure de résolution, en tant que partie au contrat ».

On doit noter que « la décision de l’autorité de résolution est immédiatement exécutoire et induit une présomption réfutable selon laquelle une suspension de son exécution serait contraire à l’intérêt public ».

Mesures de sauvegarde et recours judiciaires

En raison de l’importance des pouvoirs reconnus à l’autorité de résolution, des mesures de sauvegardes sont édictées par le règlement. Y participe le principe selon lequel aucun créancier ne peut être plus mal traité qu’en cas de liquidation. Par ailleurs des recours judiciaires sont organisés, mais ils sont très strictement encadrés. Il en est ainsi prévu que « la juridiction fonde sa propre évaluation sur les appréciations économiques des faits réalisées par l’autorité de résolution ».

Les relations avec les pays tiers sont encadrées

Les relations avec les pays tiers font l’objet de quelques dispositions sont fondées sur la coopération et l’échange d’informations confidentielles. Le règlement permet également la reconnaissance de la procédure de résolution d’un pays tiers relative à une CCP de pays tiers.