4 April 2018
Ce qui différencie le contrat de vente de gaz naturel liquéfié (GNL) du contrat de vente de gaz gazeux est la plus grande flexibilité dont bénéficient l’acheteur et le vendeur quant à la destination finale du gaz. Les bateaux qui transportent le GNL peuvent en effet changer de destination en fonction des évolutions de la demande et des prix sur les différents marchés.
Si les traders l’ont bien compris et pratiquent depuis longtemps l’arbitrage, celui-ci ne leur est plus réservé. De plus en plus souvent, les contrats à long terme contiennent eux aussi des dispositions permettant à l’acheteur et au vendeur de saisir des opportunités d’arbitrage.
L’un des outils contractuels les plus utilisés est le droit de diversion associé à un mécanisme de partage des bénéfices. Il s’agit de permettre aux parties de changer la destination d’une ou plusieurs cargaisons de GNL afin d’en optimiser la valeur, moyennant l’engagement de partager entre elles le profit ainsi dégagé.
Ce droit est incontestablement un avantage pour l’acheteur qui peut ainsi à tout moment arbitrer entre différentes places de marché en fonction de ses besoins et des différentiels de prix.
Il représente aussi une opportunité pour le vendeur qui, en offrant cette flexibilité, peut plus facilement trouver des acheteurs disposés à souscrire des engagements d’achat (take or pay) à long terme. Sans parler du gain potentiel qu’il peut en retirer dans le cadre du partage des bénéfices réalisé à l’occasion de la diversion…
Attention néanmoins, ces clauses de diversion et de partage de profit doivent être maniées et rédigées avec précaution.
LA VALIDITE DES CLAUSES DE PARTAGE DE PROFIT AU REGARD DU DROIT DE LA CONCURRENCE
Les clauses de partage de profit sont jugées anti-concurrentielles en droit de la concurrence européen lorsqu’elles ont pour effet de restreindre la liberté d’un acheteur situé au sein de l’Union européenne de revendre le gaz/GNL en dehors de son marché national.
La Commission Européenne, en 20021 et en 20072, de même d’ailleurs que l’autorité de concurrence japonaise (Japan Fair Trade Commission - « JFTC ») en 20173 , ont apporté les clarifications suivantes : la clause de partage de profit est illicite lorsqu’elle limite la capacité de revente de l’acheteur, c’est-à-dire sa capacité à céder le GNL/gaz après qu’il en est devenu propriétaire ; a contrario, elle n’est pas illicite quand elle accompagne une diversion qui intervient alors que le vendeur est toujours propriétaire du GNL/gaz.
En pratique, il y a donc lieu de distinguer deux catégories de contrats de vente de GNL :
Dans la première catégorie de contrats, une clause permettant au vendeur de partager le profit tiré d’une diversion intervenant pendant le transport du GNL sera en principe illicite alors qu’elle ne le sera pas en principe dans la seconde catégorie de contrat. Il résulte en effet des dernières décisions de la Commission européenne que le transfert de la propriété et des risques est considéré comme un critère essentiel pour l’appréciation de la licéité de la clause.
La clause de partage de profit en contrepartie d’un droit de diversion ne peut donc en principe valablement être introduite que dans les contrats de vente de GNL prévoyant une livraison DES ou DAP.
Une analyse au cas par cas devra néanmoins toujours être menée afin d’apprécier si les conditions d’application de la clause sont ou non déraisonnablement défavorables à l’acheteur et de nature à empêcher ou dissuader celui-ci de changer la destination d’une cargaison.
QUELQUES RECOMMANDATIONS SUR LA REDACTION DE CES CLAUSES
Le droit de diversion et le partage de profit doivent faire l’objet d’une rédaction rigoureuse et détaillée pour limiter les risques de litiges. L’acheteur et le vendeur doivent notamment se poser les questions suivantes au moment de rédiger la clause dans le cadre d’un contrat de livraison DES/DAP :
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1 http://europa.eu/rapid/press-release_IP-02-1869_fr.htm
2 http://europa.eu/rapid/press-release_IP-07-1074_fr.htm
3 http://www.jftc.go.jp/en/pressreleases/yearly-2017/June/170628.html